Le changement climatique pourrait se révéler aussi mortel que le cancer dans certaines parties du monde
En l’absence d’une action concertée et urgente, le changement climatique exacerbera les inégalités et creusera les écarts de développement humain, selon une nouvelle plate-forme de données lancée par le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) et le Climate Impact Lab.
Conçue pour autonomiser les personnes et les décideurs partout dans le monde, cette plate-forme intitulée Human Climate Horizons précise les conséquences que le changement climatique pourrait avoir sur la vie des populations en termes de mortalité, de capacités à gagner sa vie et de consommation d’énergie.
Ainsi, à Dhaka, capitale du Bangladesh, selon une hypothèse supposant des émissions très élevées, les décès supplémentaires d’ici 2100 dus au changement climatique (132 personnes sur 100.000 par an) représenteraient près du double du taux de mortalité annuel actuel du Bangladesh causé par tous les cancers, et 10 fois ses décès annuels sur les routes.
Aggravation des inégalités
Si l’on compare les impacts futurs du changement climatique sur la santé dans le monde, il apparaît que les inégalités actuelles s’aggraveront : parmi les pays du G20 — qui représentent la majeure partie des émissions cumulées de CO2 — un tiers d’entre eux connaîtra une hausse des taux de mortalité causée par le changement climatique. Cela touchera cependant près des trois quarts des pays les moins avancés, augmentant considérablement les inégalités au cours des prochaines décennies.
« En 2022, les communautés aux quatre coins du monde font face à une urgence climatique qui se fait sentir avec une rapidité et une virulence bien supérieures à ce qui était prévu, représentant à la fois une menace pour notre avenir et un risque très réel qui doit être traité ici et maintenant », déclare l’Administrateur du PNUD , Achim Steiner.
« La nouvelle plate-forme Human Climate Horizons qui se concentre sur les effets du changement climatique sur la mortalité, la main-d’œuvre et la consommation d’énergie, transmet des données et des analyses vitales aux décideurs, aidant les pays à adopter des mesures climatiques là où elles sont les plus nécessaires. Par exemple, la plate-forme montre qu’intensifier les efforts mondiaux pour atteindre les objectifs de l’Accord de Paris pourrait réduire de plus de 80% la mortalité due à la chaleur accablante prévue en 2100, sauvant ainsi des dizaines de millions de vies », ajoute-t-il.
Les nouvelles données montrent également que le changement climatique accentuera les inégalités au sein des pays. Par exemple, à Barranquilla, une ville portuaire du nord de la Colombie, dans un scénario d’émissions très élevées, le taux de mortalité d’ici 2100 causé par une hausse des températures (37 personnes sur 100 000 par an) augmenterait et serait cinq fois supérieur au taux actuel de mortalité annuel dû au cancer du sein en Colombie. Cela creuserait l’écart des taux de mortalité dus au changement climatique entre Barranquilla et la capitale Bogotá.
« Le Climate Impact Lab combine des données mondiales, des analyses des données massives et des modèles climatiques détaillés pour estimer les coûts du changement climatique et les avantages résultant de la réduction des émissions. Fondé sur des recherches solides, il montre comment les effets futurs du changement climatique se répercuteront de manière disproportionnée sur les régions les plus chaudes et souvent les plus pauvres aujourd’hui, exacerbant les inégalités existantes », a déclaré Sol Hsiang du Climate Impact Lab, Professeur de politique publique à l’Université de Californie à Berkeley. « Heureusement, le monde peut encore changer de cap en réduisant agressivement les émissions ».
Nécessaire d’agir rapidement
Les nouvelles données montrent qu’il est nécessaire d’agir rapidement, non seulement pour atténuer le changement climatique, mais aussi pour s’adapter à ses conséquences. Par exemple, à Faisalabad, au Pakistan, en supposant une atténuation modérée, les décès supplémentaires dus au changement climatique seraient en moyenne de 36 pour 100.000 personnes chaque année entre 2020 et 2039. Sans étendre considérablement ses efforts d’adaptation, Faisalabad pourrait s’attendre à ce que les taux de mortalité annuels liés au changement climatique doublent quasiment, atteignant 67 décès pour 100.000 d’ici le milieu du siècle. Une augmentation presque aussi mortelle que les accidents vasculaires cérébraux, actuellement la troisième cause de décès au Pakistan.
« Alors que nous sommes confrontés aux effets néfastes du changement climatique mondial, il est logique de se demander si les efforts de réduction des émissions de chaque pays, état ou ville font vraiment une différence. Cette plate-forme montre le rôle direct que ces efforts jouent dans la formation de notre avenir collectif », a déclaré Hannah Hess du Climate Impact Lab, Directrice associée chez Rhodium Group.
« Les projections des impacts du changement climatique sur le développement humain permettent de comprendre quelles répercussions ce monde plus dangereux auquel nous pourrions être confrontés aura sur la vie des peuples et leur sécurité humaine. Mais nous devons savoir que l’avenir n’est pas prédéterminé », déclare Pedro Conceição du Bureau du Rapport sur le développement humain. « Ces projections hyperlocalisées, en signalant l’urgence de réduire les émissions, et en faisant ressortir les inégalités émergentes dans le développement humain, donnent la possibilité aux personnes de prendre des décisions, pour finalement permettre aux communautés, aux gouvernements, aux assureurs et aux autres acteurs financiers d’agir ».
Disponible gratuitement à la veille de la Conférence des Nations Unies sur le climat (COP27), la nouvelle plate-forme donne accès à un flux de recherche en évolution qui permettra d’orienter l’action visant à réduire les effets inégaux de l’augmentation des émissions mondiales de gaz à effet de serre.
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